6 mois.
6 mois depuis cette conférence de presse qui a bouleversé la vie de tous les Québécois. 6 mois que j’ai quitté ma classe, mes élèves et mes collègues en y laissant tous mes trucs; mon lait sans lactose au frigo, mes souliers sous ma chaise et ma boîte à lunch oubliée sur mon bureau. Nous avons tous quitté le boulot jeudi en soirée un peu inquiet sans se douter de l’ampleur que prendrait cette crise. Ça faisait déjà quelques temps que ça se tramait, qu’on faisait l’inévitable lien avec la bière du même nom mais nous ne pensions jamais que ce virus traverserait la planète pour venir chavirer notre existence. Nous, les Québécois, croyons souvent à tort que nous sommes à l’abris de tout; les guerres, les conflits et les pandémies. Pas besoin de vous dire qu’on rigole moins ces temps-ci.
Une série de deuils
Je vais parler pour moi dans ce paragraphe car on a tous dealé avec cette crise à notre façon. Chez nous, ça été tout un coup de fouet. Moi qui roulait sur le 120 a eu tout un choc quand tout s’est arrêté du jour au lendemain. Nous nous sommes retrouvées à la maison, mes filles et moi pour quelques jours jusqu’à ce que mon mari nous rejoignent pour un confinement format familial. Au début, on feelait un peu en vacances; on se couchait aux petites heures du matin, on buvait plus qu’à l’habitude et nos journées se résumaient à pas grand chose. Ça a duré 2 semaines et nous nous sommes tannés de faire les larves alors nous avons tenté du mieux que nous pouvions de retrouver un semblant de routine.
Durant les 2 premiers mois, une vraie communauté virtuelle tissée serrée, nous étions motivée à faire de ce confinement un mal nécessaire. Comme bien des mouvements, ça s’est essoufflé et la réalité a fessé. L’adrénaline du début s’est estompée pour faire place à la solitude et à la mélancolie. Les petits cadeaux sur le balcon, les pains faits maison et les 5@7 Zoom n’étaient plus aussi excitants qu’au début. Je n’avais plus la patience d’être enfermée, je n’avais plus le goût de parcourir Pinterest pour des idées brico et encore moins de cuisiner. Mes marches en solo étaient de plus en plus longues, on s’est abonnés à Chef Cook It et mes sanglots de plus en plus gros.
J’ai réalisé, avec un peu de recul, que je vivais un deuil soit celui de ma vie qui n’allait plus jamais être pareille. 33 ans A.-C. (Avant-Covid).
Tout ceci me semble encore bien irréel. Jaser à mes parents du haut de mon balcon, désinfecter mon épicerie, me noyer dans le Purell et porter un masque pour quitter ma maison. Comment en sommes-nous arrivés là?
La vie
La vie a tranquillement repris son cours, les gens ont repris le boulot et les enfants viennent tout juste de retourner sur les bancs d’école. Moi je suis restée à la même place soit entre les quatre murs de ma maison. Comme je suis immunosupprimée, je ne peux me présenter à ma job parce qu’il y a trop de risques de contamination. Moi, la fille aux 15 000 projets qui se retrouve les deux pieds dans le béton coulé On a beaucoup parlé d’économie dans les derniers mois mais je serais curieuse de savoir combien parmi nous avons sombré dans une dépression causée par ce virus dont je tairai le nom.
On tient le coup, on gère notre stress pour nos p’tits, pour montrer l’exemple, parce qu’on se fait dire d’être résilients mais des fois le trop plein dois sortir. Ça été tout un apprentissage pour moi de mettre cette carapace de côté et faire place à la vulnérabilité. J’essaye de m’accrocher au positif, parce qu’il y en a tout le temps un peu, même s’il y a des jours où je resterais en boule sous ma couette.
Étonnamment, malgré la distanciation physique et le confinement, je me suis rapprochée de certaines personnes et je me suis même fait de nouvelles amies (allo Léa et Audrée). Haha, je suis quand même crampée d’avoir écrit ça parce qu’à presque 34 ans, les nouvelles amies ne pleuvent pas. La vie est pleine de paradoxes et ça, c’en est un pas pire!
Pis là, on fait quoi?
6 mois plus tard, après quelques semaines de calme, nous voilà retournés à nos postes prêts à affronter la deuxième vague. Mes filles n’auront eu le temps de faire qu’une semaine d’école avant que ces dernières ne tombent malades. Un p’tit rhume, rien de plus banal, sauf en temps de pandémie mondiale où chaque symptôme sème l’inquiétude pour les parents impuissants. J’suis fatiguée gang. Épuisée d’avoir peur à chaque fois que j’ouvre la porte, de craindre tout le monde, de pas serrer ma mère dans mes bras, de ne pas accueillir mes amis dans ma nouvelle maison, d’avoir peur de perdre un grand-parent avant d’avoir pu l’étreindre une dernière fois. Je suis brûlée que cette épée au-dessus de nos têtes mènent nos vies. Tannée de vous voir faire des partys comme si rien n’était pendant que je suis cloisonnée dans ma baraque.
Les arcs-en-ciel ont disparu et je m’ennuie de cette époque où nous croyions innocemment que tout était pour bien aller. Je ne suis pas une grande fan des câlins mais quand ça fait 6 mois qu’il ne se passe rien, je me dis qu’un group hug me ferait le plus grand bien.
6 mois…
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